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    Les anciennes maisons de la Grande Rue 
    
    L'hôtel de Plédran 
    En passant du côté de chez les Plédran
     
    (article paru dans Ouest-France, milieu des années 50). 
      
    
    Un de nos jeunes lecteurs, amoureux des vieilles choses — il en existe 
    encore parmi ceux qu'il est convenu d'appeler «.la nouvelle vague » — nous 
    transmet le texte suivant que nous soumettons bien volontiers à nos lecteurs 
    : 
    
    Ces jours-ci, le soleil est revenu éclairer les façades de nos maisons. 
    Vieilles ou jeunes, elles étaient toutes baignées d'une clarté singulière 
    dont elles semblaient presque gênées, n'ayant point encore à offrir aux 
    rayons d'un printemps précoce des fleurs ou des vignes vierges que l'hiver 
    leur avait dérobé... 
    
    Parmi nos vieilles demeures, il y en avait une plus sombre que les autres, 
    plus humiliée aussi car elle parlait tout haut de l'état lamentable dans 
    lequel on la laissait sombrer. Et bien qu'elle ait pour nom Cour des 
    Charretiers, jadis "Porche-es-Chartier", il ne lui semblait pas avoir à 
    respecter, en affichant sa crasse, ce nom prédestiné. Elle qui avait vu 
    résider en ses murs, franchi le porche, le chantre Jean de Plédran ainsi que 
    toute la parentèle de Mgr l'Evêque Maturin qui avait voulu la grouper à 
    l'ombre de son château épiscopal . Le meilleur 
    témoignage en était ce blason qui orne une des fenêtres du vieil hôtel et 
    porte les macles de Plédran. Sans parler de la graisse qui souille ce qui 
    reste des pavés du sol de son porche, négligent vestige de la vente 
    hebdomadaire de nos pittoresques marchands de « porche », l'œil est 
    désagréablement attiré par un malencontreux revêtement de ciment qui masque 
    sur toutes les faces l'appareil simple et noble de ces vieux murs. Les 
    partis politiques se disputent son seul pilier de granit pour coller des 
    affiches régulièrement déchirées par une main vigilante qui respecte les 
    antiquités. On a séparé sa voûte par un échafaudage en bois, d'un côté l'on 
    vous fait les galettes, de l'autre les saucisses et si vous réclamez les 
    deux éléments à la fois, l'échange est opéré au travers des barreaux de bois 
    noircis de l'huile où croustillent nos cochons. Pourquoi ce treillis .... Un 
    amateur de jardins et de fleurs a essayé dans cette cour de planter pieds de 
    vigne vierge et de capucine, mais bientôt il dû reculer devant le flot 
    journalier des eaux ménagères jetées avec désinvolture du pas des portes et 
    qui faute d'écoulement, allaient se perdre avec plaisir dans la terre 
    fraîche où reposaient les frêles plantes... Il faudrait terminer en 
    signalant que sous cette voûte antique on y devrait placer un urinoir 
    gothique afin qu'on puisse aider ceux là qui sont pressés et qui oublient 
    souvent que de tels monuments doivent être respectés. 
     Voilà pourquoi cette vieille maison était si sombre, elle avait honte. 
     
    
    Maintenant, elle a peur de tous les visiteurs qui viendront cet été pour lui 
    adresser une critique trop facile et trop juste que son orgueil de vieille 
    doloise, ne pourrait supporter. Elle fait appel à 
    notre Municipalité, c'est à elle de juger afin d'agir avant les prochains 
    rayons de soleil,.. 
    
    Faut-il rappeler que nous sommes déjà intervenus au sujet de cette cour aux 
    Charretiers que visitent chaque année, des milliers de touristes. Insistant 
    sur l'état lamentable dans lequel elle se 
    trouvait, et la triste renommée qu'elle donnait à notre ville. 
    
    A la suite de cette intervention, l' affaire était venue devant le Conseil 
    municipal qui, après recherches effectuées par le Secrétaire général de la 
    mairie de Dol, et de longues discussions — au total plus de temps qu'il n'en 
    aurait fallu pour mettre la cour en état — avait conclu que la cour 
    appartenait aux propriétaires des immeubles riverains et qu'il n'avait pas à 
    intervenir. 
    Il est certain que, à l'époque, il aurait fallu engager certains frais pour 
    améliorer l'état de cette cour en établissant un système d'évacuation des 
    eaux et en la repavant. 
    
    Mais maintenant, les choses ne se présentent plus tout à tait de la même 
    façon, les propriétaires venant de raccorder les immeubles bordant la cour 
    au tout à l'égout et la question la plus coûteuse celle de l'évacuation des 
    eaux, ne se posant plus. 
    
    Ne serait-il donc pas possible d'utiliser quelques pavés retirés de la 
    Grande-Rue et pouvant encore se trouver dans le dépôt de matériaux de la 
    Ville pour améliorer le sol de cette cour afin qu'elle présente enfin aux 
    touristes un visage digne d'une ville qui, chaque année, se classe 
    honorablement au concours des villes fleuries (le jury n'ayant jamais eu la 
    curiosité de venir visiter la Cour aux Charretiers). 
    
    Les habitants de la cour, et tous les Dolois justement fiers de leur ville 
    espèrent que la Municipalité pourra répondre par un effort à celui qui vient 
    d'être fait par les propriétaires des immeubles riverains. |